Tess of the d'Urbervilles, Thomas Hardy
Ce roman, c'est l'histoire d'une fleur des champs, d'une femme pure victime de la cruauté et de l'étroitesse de vue et de coeur de la société anglaise du XIXème siècle. Envoyée par ses parents, naïvement calculateurs, chez leurs riches "cousins", Tess n'est pas de taille face à la corruption d'Alex d'Urberville. Et quand elle pense pouvoir oublier, puis se faire pardonner sa "faute" par celui qu'elle aime réellement, Angel Clare, elle se heurte finalement à la même insensibilité: les deux hommes de sa vie l'aimeront et la comprendront toujours trop tard.
Ma pauvre poignée de mots ne peut rendre, ne veut même essayer de dire toute la beauté de l'écriture de Thomas Hardy: la richesse de ses trouvailles, les symboles et les prémonitions dont il tisse subtilement le récit, les échos qui se répondent d'un chapitre à l'autre, d'un personnage à l'autre.
Les faits, peu nombreux, sont pratiquemment éludés, Hardy étant un maître de l'ellipse pudique. Le drame avance lentement, toujours près de la terre, des saisons - et d'autant plus cruellement qu'il prend son temps et ménage de petits répits à ses héros tourmentés.
Ce n'est pas un roman moraliste. Si Hardy précipite sa Tess dans les plus sombres tourments, avec un acharnement proche du sadisme, ce n'est pas pour faire la leçon à ses lecteurs sur la nécessité de la vertu, mais bien pour dénoncer une société étouffante et hypocrite, face à laquelle une jeune fille naïve et sincère, à contre-temps donc, n'a aucune chance: Tess est bien le roman d'une femme pure, pas celui d'une femme "perdue".
Ne vous laissez pas distraire par les trouvailles de la langue, par les constructions élaborées du récit, par la beauté des scènes rurales et l'aura romantique du siècle.
Des héros innocents et poursuivis par la fatalité.
Une société qui ne pardonne pas.
Du tragique qui colle aux semelles.
Ceci est bien un roman noir.
"He had an almost swarthy complexion, with full lips, badly moulded, though red and smooth, above which was a well-groomed black moustache with curles points, though his age could not be more than three- or four-and-twenty. Despite the touches of barbarism in his contours, there was a singular force in the gentleman's face, and in his bold rolling eyes." |
"Angel Clare rises out of the past not altogether as a distinct figure, but as an appreciative voice, a long regard of fixed abstracted eyes, and a mobility of mouth somewhat too small and delicately lined for a man's, though with an unexpectedly firm close of the lower lip now and then; enough to do away with any inference of indecision." |
"(...) her mouth he had seen nothing to equal on the face of the earth. To a young man with the list fire in him that little upward lift in the middle of her red top lip was distracting, infatuating, maddening. He had never before seen a woman's lips and teeth which forced upon his mind with such persistent iteration the old Elizabethan simile of roses filled with snow. Perfect, he, as a lover, might have called them hoffhand. But no - they were not perfect. And it was the touch of the imperfect upon the would-be perfect that gave the sweetness, because it was that which gave the humanity." |